La création d’Aelgonshar marqua le début de la IIIe Ère d’Anathem.
Le continent de Daefora, situé au centre du monde, devint la plateforme incontournable de tous les échanges et de toutes les préoccupations. Une coopération sans précédent naquit entre les peuples Mortels et un véritable âge d’or débuta.
L’échange des connaissances et des méthodes permis de grandes avancées dans les domaines de la technique, de la magie et de la politique. On chercha à améliorer la condition des plus modestes et à dynamiser même les régions les plus hostiles.
Les premiers siècles de la IIIe Ère laissèrent ainsi planer l’illusion d’une paix durable et d’une unité de la Mortalité.
Malheureusement, le réel rattrapa les peuples à l’orée du 6ème siècle de cette ère lorsque fut posée la délicate question de l’expansion et des ressources. Conscients que cette paix donnait aux peuples les plus fertiles l’occasion de renforcer leur population, la question de la gestion des espaces et des vivres vint sur la table du conseil d’Aelgonshar.
Afin d’éviter que les prochains siècles ne soient le théâtre d’une guerre sans fin, la Mortalité décréta le lancement d’une grande vague de colonisation au sein des continents et des archipels les plus reculés d’Anathem. De nombreux navires s’élançèrent ainsi à l’assaut de ces lieux oubliés.
Les colons découvrirent des îles sans pareilles, des richesses insoupçonnés et des trésors sans âge d’une valeur inconnue. Humains, nains, elfes et tous les autres commençèrent à établir avant-postes et villages.
Les Mortels domptèrent les éléments et les périls de ces terres vierges pour mieux y imposer leur domination, rapportant en leurs contrées natales histoires et fortunes. Durant pratiquement six siècles, il n’y eut que prospérité et découverte.
En ces temps d’expansion, la sagesse des Anciens fut oubliée. Les conséquences de cette amnésie furent terribles. Depuis les tréfonds des grottes, les profondeurs des flots et les immensités des cieux, leur colonisation éveilla des entités autrefois endormies.
Les Immortels et leurs serviteurs émergèrent pour défendre ce qu’ils considéraient comme leur territoire légitime. En l’espace d’une poignée de jours s’éteignirent les efforts d’un siècle quand les premières batailles éclatèrent.
Prévenus de la situation, les nobles d’Aelgonshar dûrent statuer en urgence sur ce qu’il convenait de faire. Malgré les mises en garde du Conseil des Six, une motion guerrière fut votée à l’unanimité.
Ainsi naquit la première, et la dernière, armée commune de la Mortalité. Toutes les nations, tous les états et toutes les cités furent mises à contribution – de gré ou de force – pour fournir des troupes à l’effort de guerre.
En un temps record une quantité de soldats sans précédent fute prêt à partir au front. La Guerre Éonique débuta.
Les affrontements entre Mortels et Immortels durèrent près de 400 ans. Les premiers pouvant compter sur la fécondité de leurs peuples pour fournir de nouveaux soldats. Les seconds s’appuyant sur leurs incroyables pouvoirs pour tenir la distance.
D’abord mise en échec, la Mortalité déploya des trésors d’ingéniosité – et parfois d’horreur – pour se doter de pouvoirs capables de rivaliser avec ceux des Dragons, des Élémentaires et de tous leurs serviteurs.
La Guerre Éonique fut, et demeure, la plus longue guerre de l’histoire. Elle connut des phases de calme mais aussi de terribles boucheries. Les quatre derniers siècles de combats furent les plus meurtriers.
Au pinacle de la guerre, décidé à détruire la cité d’Aelgonshar, le dragon Seimaru coordonna une attaque brutale des siens contre le continent de Daefora.
Des semaines durant des combats d’une sauvagerie sans commune mesure eurent lieux au coeur même du domaine de la Mortalité.
La bataille d’Aelgonshar fut titanesque mais nul récit ne peut en faire description car alors que les déferlantes magiques s’affrontaient, le continent s’effondra sur lui-même, torturé par les émanations qui le déchirait.
Daefora se fractura, éclata et fut engloutit sous les flots. Les radiations éthérées dissloquèrent Mortels comme Immortels présents à sa surface. Les pertes ne sauraient être comptées.
L’implosion de Daefora fut vécue comme un véritable traumatisme par la Mortalité qui prit conscience de l’état calamiteux de ses royaumes. Certains continents, dévastés si ce n’est abandonnés, étaient à jamais tombés dans une déliquescence certaine.
La Guerre Éonique connut une accalmie et c’est à cet instant précis que les Douzes apparurent. A l’apparence de mortels, ils parcoururent les terres et cités désolées, s’en allant aider les miséreux, parler aux nobles et tempérer les Immortels.
Au fil de leur périple, ils fondèrent la Guilde des Aventuriers, une organisation vouée à apporter la stabilité de part leur monde. Ils formèrent une toute nouvelle génération destinée à leur succéder. En l’espace d’un siècle, les Douzes désamorçèrent bien des conflits si bien que l’on cru la Guerre Éonique définitivement achevée.
Hélas, nul accord n’avait été trouvé et dans les deux camps, des prêcheurs de chaos annonçaient la reprise des hostilités. Dans les décombres d’Anathem, cette folie signerait la fin de la vie telle qu’elle existait depuis l’Âge des Arbres. La diplomatie ayant trouvée ses limites avec les plus récalcitrants, les Douzes décidèrent de rentrer physiquement au coeur du conflit.
Les dernières années de la Guerre Éonique furent ainsi le théâtre d’une purge. On sait que du roi le plus orgueilleux au Dragon le plus revanchard, tous furent abattus ou pacifiés.
Une poignée d’années plus tard, il devint évident que plus aucun conflit n’éclaterait. Les Immortels avaient été majoritairement contenus ou assassinés, et les nations belliqueuses détruites.
Au sortir des carnages, le Conseil des Six pris ses responsabilités en tant que dernière organisation de pouvoir neutre sur Anathem.